Mouloud Achour reçoit James Hetfield, le leader de Metallica. Après huit longues années d’attente pour les fans, le groupe mythique de heavy metal vient de sortir son onzième album, Hardwired…To Self-Destruct, et entame une tournée mondiale. Dans cette conversation, James Hetfield se dévoile comme rarement : il partage son ressenti sur les attentats du 13 novembre, évoque sa croyance en « une force supérieure qui lui aurait sauvé la vie », le rapport à la célébrité et… les goûts musicaux très mainstream de sa femme.
Mouloud : Maintenant, place à la douceur, à la chaleur et à l’amour, avec l’interview exclusive de James, le leader de Metallica. Salut James !
James : Salut !
J’aimerais te remercier au nom de tous les Parisiens pour votre album “Liberté, Egalité, Fraternité, Metallica !”
Le plaisir était pour moi.
Peux-tu me parler de ce que la musique peut apporter aux gens ?
Je ne sais pas vraiment ce que ça fait, d’avoir vécu ces événements en tant que Parisien. C’était probablement très effrayant. Pour moi et Metallica, dès que quelque chose d’effrayant se passe, on se réunit et on joue. Ça nous rassure, ça nous apporte de la joie et de la sécurité. On espère qu’on transmet ça aux autres, surtout à ceux qui aiment la musique.
Vous avez fait de la musique populaire sans faire de la pop. Comment avez-vous su rester aussi authentiques ?
Tu veux dire que tu ne vas pas aimer les danseurs sur notre prochaine tournée ? (rires) Tu sais… On joue la musique qu’on aime, c’est aussi simple que cela. Être populaire, qu’est-ce que ça veut dire ? Qui te rend populaire ?
Les gens.
Les gens qui aiment ce que tu fais. Et je pense que les gens aiment ce que nous faisons parce qu’on le fait pour nous. On est honnêtes.
En tant que membre de Metallica, est-ce que tu aimes d’autres styles de musique comme le rap, etc. ?
J’aime tout ce qui m’émeut. Beaucoup de choses que mes enfants écoutent m’énervent vraiment.
Comme quoi ?
Juste les paroles, c’est parfois tellement débile… Ma femme surtout, elle écoute de la dance avec des paroles complètement vides ! (rires) Elles ne parlent que de danser…. Mais pourquoi pas !
“À gauche ! à droite !”
Exactement, du style : “Viens, on se retrouve en boîte, etc.” (rires) Ce n’est pas assez profond à mon goût mais elle adore ça, ça la fait danser et ça l’amuse ! Je ne juge personne. Parfois mes enfants mettent des chansons qui attirent mon attention mais que je trouve tellement bizarres ou complètement obscures. Des sons totalement nouveaux que je n’avais jamais entendus avant. Je ne peux pas te dire qui c’est, mais je crois beaucoup en la nouvelle génération de musiciens, certains sont très créatifs !
Ton premier groupe s’appelait Obsession : quelle est ton obsession du moment ?
Jouer de la musique, sortir des albums, avoir un public, c’est ça qui me rend heureux. Faire des concerts me rend heureux. Attendre huit ans entre deux albums, c’est trop long ! Quand je vois notre public, je me demande pourquoi on attend aussi longtemps…
Tu sembles obsédé par la vérité : quand j’ai vu votre documentaire Some kind of monster, j’ai été séduit par vous, intellectuellement parlant. Vous avez eu la force de montrer vos faiblesses à tout le monde !
J’ai toujours pensé qu’il fallait que je cache mes faiblesses, comme un soldat face au monde, mais si je suis honnête envers les autres ils m’aideront ! Les autres m’aident.
Au début de l’interview, je t’ai remercié au nom de Paris. J’ai une question toute simple : qu’est-ce que ça fait d’être Américain en ce moment ?
Je pense qu’il y a beaucoup de peur. Pas seulement aux États-Unis mais dans le monde, et il faut qu’on se rende compte que la réponse se trouve quelque part au milieu, entre un extrême et l’autre ! S’il y a autant d’extrêmes, c’est parce qu’on cherche l’équilibre. Tout est une question d’équilibre. Je suis convaincu que tout ira bien : on passe toujours par des crises, mais on y survit.
Tu as envoyé un message politique fort en Colombie lorsque tu as décidé de distribuer de la nourriture aux gens et levé des fonds pour ça. C’est à ça que la politique devrait ressembler aujourd’hui !
C’est de la politique ?
C’est prendre soin des gens…
Ce n’est pas de la politique, c’est seulement humain.
Pour toi, c’est quoi “être humain” ? Outre Metallica, la célébrité, tout ça, les caméras…
Je dirais qu’être humain, c’est être capable de merder, et d’en tirer une leçon, de mettre la main dans le feu, de se brûler et de ne plus jamais recommencer, de faire des expériences de vie, de tout essayer et de comprendre que fauter, faire quelque chose de mal, ou faire des erreurs, c’est comme ça qu’on apprend. Il faut être indulgent avec soi-même !