Le libraire se cache non pas pour mourir, mais pour mieux dénicher et partager les sorties Bds à retenir.
Ah, l’adolescence…la dernière année du collège, le moment des choix, les mots à la fin de l’agenda de la fin de l’année de la fin de l’insouciance, même si on se promet qu’on sera meilleurs amis et qu’on se retrouve après la colo (bon ok, c’est sûrement un peu ringardos la colo, en 3ème, je sais plus trop, c’était y’a longtemps, et en plus moi on m’envoyait plutôt chez la famille, à la ferme, tuer le cochon pour faire de moi un homme).
Et pendant ce temps, Kome et Keisuke se cherchent. Ils se cherchent un peu chacun dans leur coin, tourmentés qu’ils sont par l’adolescence et la pression sociale (c’est déjà pas simple, comme période de la vie, mais alors au Japon ça a l’air coton) : elle se rend compte qu’une fellation ne suffit pas à se mettre un garçon dans la poche et lui se rend compte qu’il est un peu amoureux d’elle, mais que là tout de suite, ça va pas être possible.
Non, vraiment, l’adolescence ça craint un peu quand on ne rentre pas dans les normes des chaussons préparés au pied du lit (enfin du futon).
Ils vont vite se trouver, cela dit. Pour des parties de jambes en l’air très sobres, très dénaturées, très détachées, purement physiques mais sans passion aucune. Parce qu’après tout, coucher, c’est bien aussi, ça tient chaud et c’est agréable. Lui l’accepte parce que c’est mieux que rien et que ça convient assez à son asociabilité et puis il est un peu paumé… (il a beau l’avoir trouvée, il continue de se chercher). Elle l’accepte parce qu’elle est complètement paumée, que ça occupe et que de toute façon personne n’en saura rien, ça va, c’est que du cul, c’est bon, on va pas en faire un plat.
Tout ça suinte le mal de vivre, la froideur et la (fausse) distance. Et pourtant, le lecteur, dans sa position de voyeur non-voyeuriste (je me comprends), subit la crudité des scènes de sexe (oui, ce n’est pas à mettre entre toutes les mains) imposées par l’auteur, et se retrouve fasciné et profondément (oui bon) marqué par ces personnages singulièrement touchants. Là où ça pourrait être malsain et gratuit, c’est au contraire très fin et attendrissant, quelque part.
L’adolescence, dans l’univers d’Asano, n’est pas faite de sentiments exacerbés, de trahisons, de drames pour pas grand-chose et de han, pourquoi t’as pas répondu à mon texto cette nuit. Non, là c’est âpre, c’est rude, c’est pas facile tous les jours, c’est l’introspection, une société qui ne laisse aucune chance aux exclus avec pourtant, au loin, tout là bas, un bout du tunnel coloré avec un morceau d’arc-en-ciel dedans.
La Fille de la plage – Inio Asano – IMHO
Une histoire en deux tomes.