Une idée dont on pourrait s’inspirer en France, notamment après les violences en marge des manifestations lycéennes de ces derniers jours.
Brandon Anderson vient peut être de trouver un moyen de défense efficace face aux violences policières aux États-Unis. Son idée : créer une application nommée « Swat » pour Safety With Accountability and Responsibility, « Sécurité avec responsabilité » en version française. Elle répertorie sur une carte tous les cas de violence policière notifiés par les utilisateurs à la suite de leur rapport aux forces de l’ordre.
L’histoire de Brandon Anderson avec la police est compliquée, comme souvent lorsque l’on est noir aux États-Unis. Très jeune, le natif d’Oklahoma a dû composer avec l’emprisonnement de sa mère. Un drame qui ne l’a pas empêché de servir les troupes américaines en Irak en tant qu’ingénieur satellite. À son retour de mission, Brandon apprend la mort de son meilleur ami, tué en 2007 par la police d’Oklahoma, deuxième ville américaine où la police a tué le plus de civils en 2015 selon un classement réalisé par The Counted (qui comptabilise chaque civil tué par la police américaine).
Après quelques petits boulots, l’ex-soldat s’inscrit dans un Community College de Seattle pour être transféré deux ans plus tard au sein de la prestigieuse université Georgetown à Washington. Et c’est lors de sa dernière année d’études qu’il commence à élaborer son projet. À l’origine Brandon Anderson souhaitait créer une application afin d’automatiser les plaintes des victimes de violences policières pour en finir avec le tabou de la plainte pour bavure chez certaines populations. Le but était de travailler en collaboration avec les institutions judiciaires et policières pour les améliorer de l’intérieur. Mais le prototype ne prend pas, probablement à cause d’un pessimisme exacerbé concernant un éventuel changement du système.
Brandon Anderson ne baisse pas les bras pour autant, et décide de se passer de la structure administrative américaine en créant une base de données indépendante qui va servir de baromètre de l’action des forces de l’ordre aux Etats-Unis. « Nous sommes tous impliqués dans la question de la confiance aux autorités, mais nous n’allons pas les attendre (…) On va devoir le faire nous-mêmes » explique Brandon à Kaveh Wadell, journaliste pour The Atlantic. Pour ce faire, l’ingénieur pense à la « sousveillance » (conceptualisée par Steve Mann ). La sousveillance peut se résumer au fait de recueillir des informations en réponse à une surveillance accrue, comme par exemple celle de l’administration américaine. Ici il s’agira donc d’une sousveillance citoyenne pour observer et mettre en avant les failles des rapports entre policiers et civils. Un rapport déséquilibré, qui tourne souvent à l’avantage des policiers même lorsque ceux-ci sont coupables d’homicide.
L’ambition de ce projet réside dans l’humanisation de la data. Face à la froideur de l’immense banque de données d’informations que possède l’administration américaine sur ces citoyens, Swat propose de délivrer des « micro-moments » composés de photos, vidéos dès qu’un rapport avec la police tourne mal. L’objectif ici est d’humaniser ces histoires pour faire prendre conscience aux citoyens de l’importance de ce phénomène. « Les gens comprennent mieux les données lorsqu’on les humanise, quand elles proviennent d’un point de vue qu’ils peuvent comprendre » ajoute Brandon qui, grâce à cette application (toujours au stade de projet), espère responsabiliser les autorités américaines sur la question des violences policières.
Photographie à la Une © Capture d’écran Youtube