Ils ont entre 22 et 23 ans et écument les soundcloud, les bars et les talents du monde entier. Premiers à avoir invité les chanteuses Abra et Tommy Genesis sur la scène française, le collectif Fils de Venus, créé en 2011, propose de la musique pointue dans des salles accessibles. Romantiques et insatiables, ces chasseurs de tête incarnent une frénétique soif d’ouverture. Clique les a rencontrés.
Qui êtes-vous, Fils de Vénus?
On se définit comme un collectif qui organise des concerts et des soirées en club à Paris et région parisienne. On héberge des DJ résidents, des vidéastes, des musiciens comme De La Montage, Bagarre ou encore des producteurs comme Anyone. Sinon, il y a tout un tas de copains qui nous aident de temps en temps, ce n’est pas fixe. On a déjà passé cinq heures à gonfler 600 ballons au Social Club. Et là on était une quinzaine. Mais si on devait citer tout le monde, on finirait par évoquer tous ceux qui viennent à nos soirées et nous font confiance. C’est grâce à eux que le projet vit.
Les 600 ballons, gonflés un à un au Social Club.
Quelle est l’histoire derrière ce nom, « Fils de Vénus »?
On avait 18 ans. On a tous grandi à Pigalle et il y avait dans les environs un théâtre porno qui s’appelait Cupidon. Il avait des néons roses tout kitsch, on l’aimait bien. Du coup on s’est appelé ‘Cupidon Fils de Vénus’ puis finalement on est devenu les Fils de Vénus.
À quoi ressemblaient vos débuts?
On organisait des soirées à Ménilmontant et on était rémunéré en shots. Ça n’était pas vraiment cadré. Aujourd’hui on a vieilli, en même temps que le projet. Mais on est toujours ce même groupe de potes.
Vous avez commencé en 2011. Cela fait bientôt 5 ans que vous existez. Vous allez faire quelque chose pour votre anniversaire?
Oui, une soirée en février à la Bellevilloise, avec les artistes qu’on aime, des résidents et des copains. On veut que ce soit festif et ouvert, pour remercier ceux qui nous font confiance et nous suivent depuis ces cinq années.
Comment vous définiriez votre style?
Tout le monde dit que c’est le bordel. Nous, on se dit que notre programmation doit ressembler à notre MP3. On est les enfants du XXème siècle, rien n’est antinomique, les morceaux vont et viennent. Il n’y a pas de contraintes, si on veut passer de la disco on en passe.
On en avait marre des soirées où il n’y a qu’un seul style pendant 8h d’affilées et où l’on peut avoir l’impression de croiser toujours les mêmes personnes. On veut que les gens se croisent, se rencontrent autour de la musique et se chopent.
Nos concerts vont du garage-rock au post-punk en passant par des artistes comme Abra ou Tommy Genesis qu’on a toutes les deux invitées cette année. On les adore.
Voir le clip de « Hair Like Water », de Tommy Genesis ft. Abra :
Vous vous revendiquez du mouvement LGBT. Avez-vous une voix politique?
On fait de la programmation musicale, nous n’avons pas plus de prétention que ça. L’idée est de proposer un espace de liberté et d’ouverture aux gens. Si deux filles s’embrassent à nos soirées, on peut se dire qu’au moins elles n’auront pas à subir les commentaires désagréables de certains.
Le « LGBT-friendly » permet cette flexibilité, à la fois musicale et humaine. Hétéro, gay, lesbien, dans aucun cas on ne doit être censuré. Les gens sont là pour faire la fête, le gay-friendly n’est plus une catégorie ou une question qui doit se poser, ce ne doit plus être un critère.
Vous êtes les premiers à avoir invité la chanteuse Abra en France, comment s’est passée votre collaboration?
Cela faisait un moment qu’on pétait un peu des cables sur Abra et Tommy Genesis. On a été l’un des premiers à contacter le tourneur français, les choses se sont donc faites naturellement. Notre réflexe n’est pas de contacter les têtes d’affiche. On préfère l’intimité des salles de 400 personnes. Mais Abra est une star, elle a une maîtrise du live extrêmement impressionnante. Elle est sublime, drôle et humble. C’était très agréable de la recevoir. Un mois plus tard, on a fait Tommy Genesis.
J’imagine que ce devait être tout autant réussi…
Oui, pareil. Ce qui était agréable c’est que Tommy a quelque chose de très « thug », de très « rock » dans sa démarche. Elle est beaucoup plus brute que Abra qui, elle, a quelque chose de très parfait.
Voir le clip de « Execute » de Tommy Genesis :
L’un de vos objectifs à vos débuts était de rendre hommage à la pornographie des années 1970, qu’avait-elle de si particulière à vos yeux ?
L’une de nos vidéastes, Claire, faisait de beaux montages avec le porno de ces années là.
Les corps étaient moins aseptisés et la sexualité était plus libérée que dans la pornographie d’aujourd’hui qui est bourrée de codes. Finalement les gens se fédèrent autour d’une connerie, ça aurait pu tout aussi bien être des dauphins géants, mais nous, on a choisi le porno.
Mais dans le fond, vous êtes romantiques non?
Bien sûr ! On avait 18 ans quand on a monté ces projets là. Aujourd’hui notre vision n’a pas tellement changé : on croit encore au sextoy d’une nuit comme à l’amour d’une vie.
Quelle est votre définition d’un set réussi?
Un set réussi c’est une soirée où les gens commencent à s’embrasser. Il y a une alchimie qui s’opère au bout d’un moment. Voir les gens enlacés en soirée c’est le rêve de tout programmateur.
L’un des sets de Fils de Vénus.
Quel est votre meilleur souvenir de scène?
En programmation, c’était avec nos copains Bagarre, pour nos quatre ans. À 2h du matin le public a commencé à chanter avec eux. Il y avait une telle alchimie, et beaucoup trop de monde. C’était le chaos, la folie. Il n’y avait plus de barrières, c’était comme une sorte de grande libération, un alignement des astres du club.
L’une des soirées de Fils de Vénus.
Qu’est-ce qu’il se passe pour vous à la rentrée?
On va avoir Princess Nokia (une chanteuse originaire du Bronx, NDLR) sur la scène du Badaboum le 5 octobre prochain. Le 14 septembre on aura Palmistry, signé par le label américain Mixpak, qui vient de sortir son premier album. Il est extraordinaire sur scène. Il se met sur son laptop et le monde s’arrête. Un jour en plein live on a eu une panne d’électricité et il s’est lancé à capella pendant 5 minutes, il n’y avait plus de lumière, c’était fabuleux. Donc la rentrée va être cool.
Voir le clip de « Tomboy » de Princess Nokia :
En ce moment, vous cliquez sur quoi?
Sur lala &ce, on l’a invitée récemment en guest surprise et on va la refaire jouer le 27 septembre prochain !
Écouter « Zero », de lala &ce :
Photographie à la Une : le collectif Fils de Vénus.