Le designer Shamim est l’incarnation du self-made-man. Aux bancs de l’école française, qu’il quitte à 16 ans, il préfère les méandres d’Internet, qui devient alors son professeur particulier. À 20 ans, il se lance dans le commerce sans avoir mis un pied dans quelque école que ce soit, puis profite de son expérience pour se lancer dans la création d’une marque de vêtements : Germeii. Ses créations sont aujourd’hui vendues dans les plus belles boutiques du monde et portées par de nombreuses célébrités (de Jay Z à Usher). Il nous raconte son parcours depuis son pays natal, l’Inde, son malaise avec l’éducation à la française, sa bataille pour réussir à s’imposer dans le milieu de la mode, son amitié avec DJ Snake qu’il connaît depuis le collège, et surtout la raison pour laquelle un « non » n’est jamais un « non ». Il en est persuadé : il y a toujours un « oui » qui se cache quelque part.
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Shamim : Je suis Shamim, designer de la marque Germeii.
Comment as-tu commencé à créer des vêtements ?
J’ai commencé après un très long processus. Je ne viens pas du tout de l’univers du vêtement. Je suis autodidacte, j’ai arrêté les cours à l’âge de 16 ans.
Une fois que tu as arrêté les cours, comment s’est passée la transition jusqu’à l’entrepreneuriat ?
Ça a été dur, parce qu’une fois que j’ai arrêté les cours je suis devenu un sacré cauchemar pour mes parents. Je suis le premier de leurs enfants et c’était dur pour eux. J’ai enchaîné plein de petits jobs comme vendeur au BHV à Paris, mais je ne me sentais jamais à ma place. Je voulais faire quelque chose qui me permette de voyager. Je me suis retrouvé à bosser dans la décoration d’intérieur haut de gamme, où j’ai connu une assez bonne ascension. J’étais le seul intermédiaire entre deux multinationales, l’une allemande et l’autre indienne. J’exportais depuis l’Allemagne vers l’Inde et les Émirats, et ça m’a fait rencontrer plusieurs architectes. J’avais 20 ans quand j’ai commencé. Je me suis formé sur Internet, qui est l’un des meilleurs outils pour apprendre, puis j’ai commencé au culot en allant à des rendez-vous et aux entretiens sans être trop sûr de moi. J’ai toujours eu envie d’entreprendre.
Pourquoi voulais-tu voyager ?
Parce que je suis né en Inde, à Karikal (une ville au sud de l’Inde, NDLR). Je suis arrivé ici à l’âge de six ans. Mes racines sont là-bas. J’ai une très grande proximité avec ce pays. Chaque fois que l’on y retournait, j’apprenais toujours quelque chose. Ça m’a permis d’évoluer psychologiquement. Quand je retournais à l’école, je sentais que je ne ramenais pas la même énergie, la même force, ou les mêmes inspirations.
Shamim à 2 ans, en 1987
Qu’est-ce que ça t’a apporté, de passer les premières années de ta vie en Inde ?
Parfois, quand je dis que je travaille dans la mode, certains ont une image de moi assez figée… Mais quand je leur dis que je puise toujours ma force de là-bas, ils changent d’avis. Quand j’y retourne, je rencontre toujours des gens sincères qui ont un certain état d’esprit et qui arrivent à construire et à s’amuser avec rien.
Nous, quand on était petits, en Inde, il n’y avait pas de Toys « R » Us. Tu devais faire avec ce que tu avais, donc tu t’amusais avec des roues de vélo… Mais ça te poussait à développer un processus créatif dès ton plus jeune âge.
Les enfants qui grandissent dans ces villages, dans ces pays lointains, ils ont une autre manière de penser. Du coup, quand tu reviens en cours en France et que tu rentres dans le cursus normal, tu ne t’y retrouves plus, tu es un peu perdu. Le système éducatif en France est très bien mais on ne laisse pas assez d’ouverture vers la créativité aux jeunes.
Quelle a été ta toute première transaction en tant qu’entrepreneur ?
Cette aventure avec la décoration d’intérieur. Ça a été un long combat, parce que quand tu as 20 ans et que tu vas à des rendez-vous où tout le monde a une certaine carrure, c’est difficile de s’imposer. Toi tu es là, tu es le petit jeune qui tente sa chance. J’ai perdu beaucoup de temps et le peu d’argent que j’avais. Au bout d’un an et demi, j’ai fait ma première transaction entre l’Allemagne et l’Inde, entre deux grosses structures. À cette époque-là, mon anglais était vraiment mauvais, mais avec de la motivation et de l’ambition j’ai continué à apprendre. Quand tu es déterminé et que tu sais ce que tu veux, tu vas jusqu’au bout, tu fais des nuits blanches, tu bosses, tu apprends. L’outil principal, pour moi, c’était Internet.
Qu’est-ce que tu y apprenais ?
Tous les échanges de commerce international comme « l’incoterms« , tout ce qui est de l’ordre des liabilities, les échanges bancaires, la finance, le contrôle des marchandises… Toutes ces choses que tu apprends à l’école, je pense. La décoration d’intérieur ça a duré à peu près quatre ans et demi, ça s’est très bien passé, j’avais pas mal d’économies. Du coup j’en ai parlé à mes potes, je leur ai dit :
« Écoutez, on vient d’ouvrir un marché pour une entreprise qui a énormément de commerciaux et qui a une force de vente énorme. Elle n’avait jamais réussi à ouvrir un marché comme l’Inde, qui représente huit fois la France, on vient de le faire ».
Pourquoi je ne me lancerais pas dans une aventure pour moi finalement ? J’ai toujours aimé le vêtement, il y a tout de même une culture de l’habillement très forte à Paris et naturellement, mon amour pour le vêtement m’a conduit vers la création d’une marque : Germeii.
À quel âge as-tu créé Germeii ?
Je devais avoir 25 ans, c’était en 2010, donc ça fait maintenant sept ans. Au début je ne maîtrisais absolument pas cet univers de la mode. J’ai approché beaucoup de graphistes et de stylistes pour commencer à bosser sur une gamme de t-shirts toute simple. Je ne voulais pas vendre des t-shirts pour vendre des t-shirts, je voulais vendre une histoire, une émotion. On a donc travaillé sur des imprimés qui véhiculent quelque chose. À travers ça, j’ai rencontré des gens formidables, qui m’ont dit parfois : « c’est impossible, tu ne peux pas le faire, tu ne connais personne ». Mais même quand on me donnait des avis négatifs, je le prenais positivement parce qu’au fond de moi je savais qu’il y aurait une place. Tout le monde a sa place. J’ai constaté que c’était un milieu fermé, il y a très peu de designers de couleur. J’ai pris ça comme un challenge.
Quelle est la première pièce que tu as vendue ?
C’était en ligne, on a créé une gamme de t-shirts que l’on a mis des mois à développer, on voulait faire de la bonne qualité en ne faisant que du « made in France ». Trois semaines après la mise en vente sur le site, j’ai approché le magasin Colette. Tout le monde m’avait dit : « écoute, c’est Colette, ils reçoivent 4 000 mails par mois, ils ne vont même pas te répondre ». Finalement, je vais déposer des samples (échantillons, NDLR) chez elle et elle me répond : « votre collection me plaît, mais j’ai fini ma campagne de vente, je vais suivre ce que vous faites ». Ça m’a tellement motivé que j’ai continué à bosser. Pendant presque un an j’ai travaillé sur la manière de développer la production, développer des collections, identifier les leaders d’opinion, identifier les boutiques clés à travers le monde entier, identifier les célébrités qui vont pouvoir être les ambassadrices de la marque.
« Sold Out », t-shirt issu de la première collection Germeii
« Catch Me If You Can », t-shirt issu de la première collection Germeii
À ce moment-là, de qui t’es-tu entouré et combien étiez-vous ?
J’ai toujours eu une petite équipe de personnes que je connais depuis mon plus jeune âge et qui ont, eux, fait des écoles de commerce ou de distribution. On a toujours travaillé ensemble. Donc, au bout d’un an je retourne chez Colette déposer mes samples et trois-quatre jours plus tard je reçois un mail de son assistant qui m’envoie : « votre produit ne correspond pas du tout à l’image de notre boutique ».
De quel t-shirt s’agissait-il ?
C’était la deuxième collection, avec des motifs qui véhiculaient des émotions.
Après avoir travaillé pendant un an en espérant être vendu chez Colette, comment tu réagis quand on te dit que finalement ce ne sera pas possible ?
Je viens d’atterrir à Dubai avec mes potes et je reçois ce mail. Je suis dégoûté, je ne dis rien à personne, je crame toutes mes économies et je retourne à Paris une semaine après. J’attends un peu avant d’aller récupérer ma marchandise, et quand j’y vais, devant l’ascenseur, je tombe nez à nez avec l’acheteuse de Colette. Dans ma tête, il m’a fallu une demi-seconde pour me demander si je devais lui parler ou pas… Finalement je lui parle. Ça a duré trente secondes. Il n’y avait pas de bureau, rien de formel. Je lui ai juste demandé si elle pouvait regarder. C’était un vendredi. Le mardi suivant je reçois un mail : « Où est-ce que vous êtes vendus à Paris ? Quand est-ce que l’on peut travailler ensemble ? Quand est-ce que vous pouvez nous livrer ? » On est parti de « votre produit ne correspond pas à l’image de notre boutique » à « quand pouvez-vous nous livrer ? ».
Il a fallu des efforts et de la détermination, mais un « non », ce n’est jamais « non », il y a toujours un « oui » qui se cache quelque part.
Dernière collection Germeii, Courtesy of Shamim
Tout à l’heure tu disais que tu avais essayé de repérer des célébrités… Quand j’ai vu que sur le compte Instagram de Germeii il y avait des photos de célébrités avec des casquettes, ça m’a directement fait penser à Ed Hardy ou Von Dutch, mais en haut de gamme. Même si ça n’a rien à voir dans l’approche esthétique, est-ce que l’approche économique était un peu la même que ces marques, qui faisaient porter leurs vêtements à des célébrités pour se faire connaître ?
On a eu toutes ces personnes malgré nous. Je ne connais pas encore Jay Z personnellement ni Cristiano Ronaldo mais j’aimerais bien… Honnêtement, ce n’est pas du tout la même approche… D’accord pour la mettre en avant si on se rend compte que cette personne aime le produit ou l’a déjà, mais je ne suis pas un grand fan du show-business.
Je viens d’un univers assez simple, mes parents m’ont élevé avec humilité et modestie. Le show off ce n’est pas trop mon truc.
Tu ne distribues pas tes casquettes aux célébrités et pourtant elles les portent. En les voyant sur la tête de Jay Z, Usher et plusieurs autres musiciens, on peut penser que c’est une technique marketing comme une autre… Ça se fait beaucoup maintenant.
Oui, c’est ce que tout le monde fait. Même les grandes maisons comme Louis Vuitton et Balmain appliquent la « star strategy« . C’est très plaisant et très gratifiant de voir nos produits portés par ces personnalités. Elles communiquent dessus et véhiculent énormément de vues sur les réseaux sociaux, donc bien sûr, ça aide pour le business. Mais nous, notre approche n’est pas agressive, on ne se dit pas : « Il nous faut absolument ces personnalités pour faire vendre nos produits ». On mise sur notre énergie, sur la manière de concevoir et d’avoir le souci de rendre un produit de qualité. C’est ça notre leitmotiv.
Quand Rihanna a posté une photo de l’une de tes créations, comment as-tu réagi ? C’est toi qui lui as envoyé ?
C’était une très grande surprise parce que ce n’est pas quelque chose que j’ai contrôlé. Je n’étais même pas informé ! Ce sont des amis qui m’ont envoyé des photos. D’un coup, mes messages ont commencé à exploser. Pareil quand Jay Z a porté la casquette. Je n’y croyais pas. On essaie de faire des produits sans communiquer énormément dessus, qui parlent pour eux-mêmes. Que l’on aime ou que l’on n’aime pas, en tout cas ça intrigue. On essaie toujours de travailler sur cet esprit innovant… avec une identité. Quand tu vois un produit de chez nous, en général, tu sais que c’est du Germeii.
Le poste Instagram de Rihanna portant un pull « Riri » de Germeii, juin 2013
Tu utilises du crocodile, de l’or, et même du cuir de raie sur tes créations. Est-ce que le cuir de poisson est une matière courante en haute couture ?
Oui, c’est utilisé par les maisons comme Hermès, Alexander McQueen ou Balmain. Ce que j’ai voulu transmettre à travers l’utilisation de ces matières nobles, c’est mon amour pour celles-ci.
Un des sacs Germeii orné de cuir de raie.
Le mélange des matériaux est aussi une technique très présente dans tes créations.
Oui. Je travaille sur des produits assez simples, donc ça va être parfois une casquette, mais je vais l’agrémenter d’un bracelet de montre en or 22 carats. Je vais travailler sur des sacs à dos très simples, et y ajouter des câbles métalliques de construction. J’adore le cuir, le métal, tout ce qui est fibre de carbone. Pouvoir mélanger les matériaux, c’était un rêve depuis toujours parce que quand je travaillais dans la décoration d’intérieur, j’étais en contact avec beaucoup d’architectes. Ils m’ont sensibilisé à certains matériaux et à la manière de les travailler.
As-tu rencontré des difficultés au lancement de ta marque ?
Énormément. Aujourd’hui, construire une marque c’est comme élever un enfant. Il naît, tu dois prendre soin de lui, l’habiller, tu dois le prendre par la main et t’investir à 1 000% pour le faire évoluer. Construire une image autour d’une marque haut de gamme, c’est beaucoup de sacrifices. Tu y passes énormément de temps, tu peux mettre ta vie sociale de côté. Tu fais aussi des sacrifices financiers parce qu’il y a un grand nombre de produits qui plaît à certaines boutiques mais tu te dois de refuser certains points de vente. J’ai toujours été super sélectif dans le choix de mes boutiques. Aujourd’hui, on commence à avoir une très belle reconnaissance auprès de points de vente comme Restir au Japon, 10CorsoComo à Séoul, Excelsior, Antonia ou Antonioli à Milan.
Ce sont des boutiques dans le même genre que Colette ?
Oui, haut de gamme.
À côté de quelle marque es-tu vendu par exemple ?
Ce qui m’a vraiment choqué, c’est quand je me suis retrouvé sur la même étagère que Balmain, Balenciaga ou Givenchy… C’était super étrange.
À quel moment ta marque a commencé à s’exporter et à exploser ?
Quand Rihanna a porté notre pull, Jay Z notre casquette et Mos Def notre sac à dos…
Jay Z, au côté de Beyoncé et de leur fille, avec une casquette Germeii.
Sais-tu où ils les ont achetés ?
Non, mais récemment j’ai vu Usher avec une de nos casquettes et on a appris que ça venait d’une boutique en Italie… et qu’il en a acheté un bon paquet.
Usher avec une casquette Germeii.
Qu’est-ce que ça te fait quand tu vois tout ça ?
Ça me fait très plaisir de voir nos produits et nos créations voyager. Tu sais que tu as commencé avec très peu de moyens, et d’un coup tu arrives à Tokyo et des gens viennent te voir dans les points de vente, créent des évènements pour toi, sont fiers de porter ces vêtements… Tu n’as pas de mots, c’est énorme.
Sur certains de tes t-shirts et de tes sweats, il y a écrit « No Eyes on Me » et « Demain c’est loin ». Ce sont des références à Tupac et IAM ? Pourquoi ces hommages ?
Leur musique a bercé mon enfance et elle accompagne toujours mes jours et mes nuits.
T-shirt « Demain c’est loin » de Germeii.
T-shirt « No eyes on me » de Germeii.
Tu as laissé « Demain c’est loin » tel quel, par contre à la place d’écrire « All eyez on me » tu as écrit « No eyes on me », pourquoi ? Pourtant tu as tous les yeux rivés sur toi depuis la création de ta marque.
Pas vraiment, c’était juste une petite métaphore.
Toujours en ce qui concerne le graphisme, tu as utilisé une typographie gothique très tôt.
Oui, on était passés par un logo type baroque, et avec le temps on a fait évoluer la gamme.
Montage photographique issu de l’article
« Why is fashion so obsessed with gothic fonts? » de Dazed
Tu as remarqué que maintenant on voit beaucoup cette typographie sur les podiums ?
Oui. D’ailleurs j’ai vu pas mal de mes créations récupérées, notamment les câbles sur les sacs. Mais bon, je ne suis pas du tout inquiet, je me dis que si c’est copié, c’est que l’on a fait du bon travail.
Tu as commencé à utiliser la typographie gothique en quelle année ?
Peut-être 2008. À ce moment-là, la marque Vêtements (l’une des grandes révélations de ces dernières années, NDLR) n’existait pas.
Veste Vêtements © compte Instagram vetements_official
Laquelle de tes pièces s’est le mieux vendue ?
Ce sont nos t-shirts puis nos casquettes. Ceux qui se sont le mieux vendus sont certainement les « No eyes on Me » et les « Riri ».
Shamim et la casquette Germeii, produit phare de la marque.
Est-ce que tu t’es inspiré de l’identité visuelle de l’Inde ?
Je m’inspire plus de leur culture et de leur manière de penser que de leur identité graphique. J’ai pas mal de collections qui vont arriver prochainement où l’on va retrouver l’esprit graphique indien. On va avoir un mix, une fusion entre la culture française et d’autres – parce que forcément ma culture française est plus importante. Ma richesse, aujourd’hui, ce sont les voyages. Donc je vais faire parler mes rencontres et mon amour pour les autres pays et les autres cultures.
On te voit régulièrement dans les posts de DJ Snake sur les réseaux sociaux. Vous vous connaissez bien ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?
C’est mon ami d’enfance, on a grandi ensemble. On s’est connus en classe de 6ème, ça fait maintenant presque 20 ans.
Shamim et DJ Snake, courtesy of Shamim
Que faisiez-vous quand vous étiez plus jeunes ? De quoi rêviez-vous ?
Lui, étrangement, très tôt il savait qu’il allait être DJ ou musicien. C’était quelqu’un de très visionnaire. Il savait que sa musique allait voyager, qu’elle allait être internationale. Il savait qu’il allait avoir un rayonnement mondial. C’est un très, très grand perfectionniste qui m’a beaucoup inspiré et qui m’inspire toujours d’ailleurs. Il a une manière de voir les choses très particulière.
Quand on était petits, on jouait au foot, on allait au McDonald’s… comme tout le monde quoi ! On avait des parents assez stricts donc on n’était pas trop dans les conneries, mais on a fait des petites bêtises de temps en temps, c’est sûr…
Le morceau « Lean On » de Major Lazer et DJ Snake comptabilise aujourd’hui plus de 2 milliards d’écoutes sur YouTube (!)
Vous vous êtes alliés pour créer une veste. Comment avez-vous décidé de travailler ensemble ?
Très naturellement. On s’est rendus compte qu’il y avait énormément de demande. Il a déjà bossé sur une gamme de t-shirts et de goodies qui marchaient très bien et ses fans en voulaient plus. À ce moment-là, on s’est dit que l’on devrait faire quelque chose. J’étais très flatté qu’il me le demande à moi, sachant qu’il y a énormément de marques aux États-Unis qui souhaitent bosser avec lui. On a travaillé sur quelque chose qui ressemble à l’identité Germeii et à l’image de Snake. Au départ on a fait 500 pièces… Elles se sont écoulées en quelques heures.
Le bomber DJ Snake x Germeii
Comment s’est passée la collaboration ?
On s’est posés à l’atelier. C’est quelqu’un qui a énormément d’idées. J’ai fait des propositions, il voulait qu’on ajuste certains petits détails sur la veste. On se comprend très vite en fait, on a à peu près la même sensibilité et la même approche du vêtement. En deux heures, on avait le dessin et la silhouette finies. C’est allé très vite.
Vous avez tous les deux la passion du voyage, est-ce que vous partez ensemble parfois ?
Très souvent. On se voit beaucoup plus à l’étranger qu’en France. Récemment j’ai fait Coachella, Las Vegas, Marrakech, Londres… On a une certaine connexion et ça nous permet de discuter de nos prochains projets et de voir comment évoluent nos différents business. Ça nous permet aussi de nous relaxer.
DJ Snake et Shamim, courtesy of Shamim
Quels sont les artistes qui t’inspirent ?
Il y en a beaucoup. Le peintre Claude Monet dans sa vision, son style. En tant que styliste, j’aime beaucoup Dries Van Noten, c’est une grande inspiration, comme Alexander McQueen. Dans la musique il y en a énormément… Tupac, Jay Z, Mos Def, Lauryn Hill…
Étang de Nénuphars II, Claude Monet (1899)
Pour toi qui t’es construit tout seul, est-ce que tu te retrouves dans la phrase de Drake que l’on a beaucoup entendue : « Started from the bottom now we’re here » ?
On vient juste de franchir les premiers pas de cette industrie, mais il reste encore énormément de paliers à gravir. Pour le moment on est encore en bas. Moi-même je suis super surpris quand je vois nos parutions dans la presse… Quand je vois Vogue Italie qui m’annonce en tant que prochain grand designer, je suis choqué. On a commencé modestement, on a de grandes ambitions et une grande vision mais on garde la tête sur les épaules, on sait qu’il y a beaucoup de travail.
Tu pourrais me donner quel exemple d’une personne qui, pour toi, a un style incroyable ?
Karl Lagerfeld… l’éternel.
Karl Lagarfeld © Elle
Quels seraient les conseils que tu donnerais à un jeune entrepreneur qui veut se lancer ?
Qu’il continue de rêver et qu’il continue de croire en ses des visions. Qu’il continue à se battre durement et de ne pas avoir peur des échecs, mais à apprendre des échecs. Qu’il continue à rester positif, à bien s’entourer et à motiver ses équipes, parce que, peu importe le projet que tu entreprends, c’est avant tout une question d’humains. Il n’y a pas de projet qui se fait sans le relationnel, sans la motivation et sans une équipe solide.
Et ne jamais oublier qu’un « non », ce n’est jamais un « non », il y a toujours un « oui » qui se cache quelque part. On nous a toujours dit que ce n’était pas possible pour telles ou telles raisons… si, c’est possible.
Photographie à la Une : Shamim