Le court-métrage d’anticipation Mab An Tarz réalisé par Théo Jourdain avec Alexis Manenti (César du Meilleur Espoir Masculin pour Les Misérables de Ladj Ly) est à voir en exclusivité en 4k sur notre chaîne YouTube. Un court-métrage que l’on avait à cœur de vous partager après une année où beaucoup de bons films indépendants n’ont pas pu sortir en salles ou être diffusés dans les festivals.
Produit par Nationale 12 avec l’aide de la Région Bretagne, des chaînes locales de Bretagne et le CNC.
Dans ce court-métrage, on suit la dérive du chalutier Mab An Tarz et de son équipage. Plus particulièrement le parcours de Thomas (Alexis Manenti), pêcheur du Guilvinec, qui sombre dans les addictions après la perte de la garde de sa fille. Criblé de dettes, cette virée en mer va être une question de vie ou de mort pour lui : s’il veut rembourser ses créanciers, les filets devront être pleins. Seul problème, pas l’ombre d’un poisson en mer… Thomas voudra aller pêcher plus au large, au-delà de la limite autorisée, surveillée par des drones de frontières.
Entre photographie froide et impeccable, musique techno vrombissante et une performance saisissante d’Alexis Manenti, Mab An Tarz est un court métrage immanquable et prophétique en temps de Brexit.
Rencontre avec Théo Jourdain, réalisateur de cette dangereuse virée en haute mer.
Clique : Comment s’est passé le tournage en mer ?
Théo Jourdain : J’ai fait beaucoup de repérages sur le Mab An Tarz en amont, avec l’équipage de marins pêcheurs. J’ai toujours été malade. L’apogée de la peur et du doute, c’était pendant les repérages techniques avec Adolpho, le chef opérateur. On s’est retrouvé dans des creux de six mètres pendant 24 heures de navigation… On était au bout du rouleau; tandis que l’équipage mangeait des pâtes-bifteck en toute tranquillité.
J’imagine que ce sont des conditions de tournage particulières, surtout compte tenu de la météo ?
Le premier jour de tournage j’avais perdu 50% de l’équipe sur le bateau, entre les paquets de mer, le froid, les mouvements très particuliers des chalutiers… C’est le mal de mer assuré. Heureusement qu’il me restait mes acteurs, un chef op’, un ingé son et un machiniste ! Pour les deux autres journées, on a tourné dans la baie pour enlever au moins les vagues de l’équation.
Crédit photo : © Nationale 12
À quelle époque l’action de Mab An Tarz se déroule-t-elle ?
En 2039, légèrement dans le futur. Mais j’ai écrit ce film avant l’annonce du Brexit, le présent nous a rattrapé !
Dans le film, des drones policiers surveillent une frontière maritime au large de la côte. Est-ce en lien avec le Brexit ? Pour réguler la pêche suite au dérèglement climatique ?
Oui, tout à fait. En tirant le fil du dérèglement climatique, on peut imaginer que les poissons remontent vers le nord suite au réchauffement des océans. Avec l’ambiance politique qui tire malheureusement vers le protectionnisme et le repli sur soi à l’intérieur des frontières, les drones sont là pour exercer un contrôle des frontières maritimes, qui commence d’ailleurs à arriver. C’est un vrai sujet en ce moment, je ne l’imaginais pas à l’époque.
Qu’est-ce qui t’a poussé à raconter cette histoire en particulier ?
Je voulais parler de l’impuissance d’un homme face à ses addictions, à la folie qui le pousse à aller toujours plus loin pour fuir ses démons. Pour moi, cette métaphore avait toute sa place sur un bateau de pêche en pleine mer. Je suis d’origine bretonne et l’océan a une grande place dans ma vie. Je suis très admiratif du métier de marin pêcheur, c’est tellement dur, beau et plein de liberté quand vous êtes au milieu de l’océan… Et je trouve que c’est aussi un milieu très cinématographique : on pose un cadre, et tout y est.
Peux-tu parler de la musique du film ? Notamment du morceau d’ouverture.
Pour la musique du film, j’ai travaillé avec trois compositeurs. D’abord avec Ivan Munoz & Mikael Le Mûr, notamment pour le morceau d’ouverture techno. J’avais besoin de placer l’ambiance techno hardcore dès le début, pour définir le personnage de Thomas, pêcheur teufeur (du Pays Bigouden).
Et pour le reste, j’ai travaillé avec Jack Bartman, sur toutes les nappes musicales et le morceau de fin qui fait référence au film Le Grand Bleu. Le dernier morceau validé est arrivé le dernier jour du mixage…
Crédit photo : Ouest France
Comment s’est déroulée la collaboration avec l’acteur Alexis Manenti ?
Alexis a lu les toutes premières versions du script, ça faisait très longtemps que je voulais travailler avec lui. On est allé en repérage ensemble sur le Mab An Tarz pour s’acclimater un peu. Encore des vagues, encore malades, mais ça nous a permis d’être très efficaces sur le tournage. J’aime beaucoup apprendre sur les liens entre les acteurs et le metteur en scène, il y a tellement de techniques et de points de vue…
Mais ce que j’ai noté, c’est que l’étape décisive c’est vraiment le casting. Alexis était parfait pour ce rôle, comme le reste de la distribution d’ailleurs.
C’était très important pour moi d’avoir un pilier comme lui sur ce tournage. On tournait de nombreuses heures, de nuit, en pleine mer, dans le froid. Si je n’avais pas eu sa confiance à 100% sur le projet, cela aurait été très compliqué. Tout le casting et toute la production m’ont vraiment épaulé sur ce film. Et ce qui m’a comblé c’est quand l’équipage du Mab An Tarz a vu le film et qu’ils ont… validé Alexis en pêcheur breton !
Le court-métrage Mab An Tarz de Théo Jourdain avec Alexis Manenti, Arno Chevrier, Antoine Basler, Victor Pontecorvo et Cécile Fisera est disponible en exclusivité sur notre chaîne YouTube jusqu’au 7 février.
Crédits Image à la Une : © Nationale 12