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Cinéma
Par Pauline Baduel

LE FILM DE LA SEMAINE : « CARBONE », l’arnaque du siècle avec Depardieu, Michaël Youn et Gringe

Olivier Marchal a l’habitude de raconter des histoires sombres en rafale. L’ex-flic revient avec "Carbone", un polar noir - très noir - adapté d’un fait réel : l’arnaque à la taxe carbone. Pas de braqueurs ni de gros durs, mais de simples voyous. Le sujet est complexe, le film sombre et violent.

Olivier Marchal, c’est toujours l’assurance d’un thriller bien ficelé, à l’ancienne. Cette fois-ci, le flic écorché vif, un peu sale et bordeline, est mis de côté pour un héros ordinaire. Antoine Roca (Benoit Magimel) est un chef d’entreprise qui va monter l’arnaque du siècle pour sauver sa société de transports – et se faire plaisir, très plaisir.

Un long plan séquence tourné au petit matin brumeux dans les entrepôts froids du périph’ parisien et un bureau plein de factures non payées posent le décor.

Benoit Magimel, Carbone.

Ne vous fiez pas à ses lunettes bleutées et ses cheveux gominés, Antoine est un vrai fragile qui a une revanche à prendre après des années d’humiliation orchestrée par un beau-père juif plein aux as (Gérard Depardieu). Même s’il a déjà la belle voiture, l’appartement en plein cœur du Marais, femme et enfant, ce chef d’entreprise a besoin de faire ses preuves. Sa vie n’est qu’amertume, aigreur et trahison, mais c’est un « bon garçon » qui veut sauver l’entreprise de papa.

Après une discussion avec son comptable et camarade de bringue (Michaël Youn), Antoine décide d’arnaquer l’État en revendant des taxes Carbone. C’est une histoire vraie : en 2008, les entreprises polluantes ont le droit de revendre la TVA qu’elles ont payée en trop, si elles ont moins pollué que prévu. Avec son comptable et les deux frères Wizman (le rappeur Gringe et Idir Chender), Antoine va créer des sociétés écran et multiplier l’achat et la revente de ces taxes.

La fraude dure un an. Bilan : 1,6 milliard d’euros de bénéfices en France, 5 milliards à l’échelle européenne.

Carbone raconte cette « fast life » : l’ascension fulgurante d’un mec sur qui personne n’aurait misé et qui réussira à se salir les mains en portant des gants. Fêtes, jeux, grosses cylindrées, des appartements qui ressemblent aux pistes de Val d’Isère, la tête tourne, le vent aussi. Quand ce chef d’entreprise revient chez sa mère, c’est avec une voiture qui vaut plus cher que la maison. Grillé.

Benoit Magimel, Idir Chender et Michaël Youn dans Carbone. 

Pour la première fois, Olivier Marchal ne dépeint pas l’univers des braqueurs de banque, ni des gros durs. Les escrocs d’aujourd’hui sont ceux qui opèrent derrière un ordinateur et qui n’ont pas le physique de l’emploi.

Gringe, par exemple, est l’aîné sage et mesuré, la caution intello de la famille. Mai quand on change de cour, il faut savoir accepter (et connaître) les règles de ceux qui l’occupent. « Le grand art, c’est de savoir changer pendant la bataille » Antoine aurait peut-être dû écouter ce conseil…

Les femmes ? Elles sont dans le décor, dommage. Laura Smet joue avec brio la petite amie malmenée, quant à Dani (la chanteuse), elle excelle dans le rôle de la mère patronne qui magouille derrière son bar. Olivier Marchal filme assez bien la nuit dans ses excès les plus superflus. La lumière sombre des clubs parisiens éblouit parfois, l’attachement aux détails et les textes d’OrelSan compensent un scénario un peu fade. Suicide social ne nous quitte jamais vraiment.

« Aujourd’hui sera le dernier jour de mon existence
La dernière fois que je ferme les yeux
Mon dernier silence
J’ai longtemps cherché la solution à ces nuisances
Ça m’apparaît maintenant comme une évidence
(…)
Aujourd’hui je mettrai ni ma chemise ni ma cravate
J’irai pas jusqu’au travail, je donnerai pas la patte
Adieu les employés de bureau et leurs vies bien rangées
Si tu pouvais rater la tienne, ça les arrangerait »

Carbone, d’Olivier Marchal, avec Benoit Magimel, Gérard Depardieu, Michaël Youn, Gringe…
1h44, en salles mercredi 1er novembre.

Image à la Une: Carbone.

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