Le documentaire sur sa vie, un film de son amie Rokhsareh Ghaem Maghami, a gagné le grand prix du jury pour les documentaires étrangers au dernier festival de Sundance, fin janvier 2016. Deux mois plus tard, Sonita donne de ses nouvelles au site Dazed et revient, dans une interview, sur son parcours musical .
À 19 ans, Sonita Alizadeh revient de loin. Après avoir fui l’Afghanistan, les talibans et un premier mariage forcé à 10 ans, pour vivre clandestinement en Iran, elle se plonge dans musique, et rêve d’en faire sa carrière. Si elle commence par la pop, elle écrit ses premiers raps à 14 ans, alors qu’elle survit en nettoyant les vestiaires d’une salle de sport contre un maigre salaire.
Seulement, deux ans plus tard, sa mère – elle-même mariée de force à 13 ans – la retrouve en Iran, et essaie de la vendre à un homme, pour un peu moins de 8 000 euros (« C’est la tradition », dit-elle à sa fille, dans une scène visible dans le documentaire, pour toute justification).
Ce n’est que grâce à l’intervention de Rokhsareh Ghaem Maghami, cinéaste, que Sonita ne subit pas ce triste sort. Rokhsareh, qui l’a rencontrée quelques mois plus tôt via une proche, a décidé de raconter la vie de Sonita. Au fil du temps, des liens se créent entre elles, bien au-delà du film. Et lorsque la perspective du mariage forcé devient réelle, Rokhsareh aide Sonita à s’échapper (« nous sommes devenues comme deux soeurs », raconte la réalisatrice au New York Times).
Entretemps, Sonita Alizadehest est devenue un phénomène musical grâce à son premier clip, « Brides for Sale ». Le morceau, posté en octobre 2014, dénonce avec véhémence la violence subie par les filles et femmes mariées de force.
« Dommage que vous ne relisiez pas le Coran, dommage que vous ne sachiez pas qu’il ne dit pas que les femmes sont à vendre » rappe la jeune fille.
Cumulant près de 400 000 vues sur Youtube, ce clip lui a permis de se consacrer entièrement à sa cause depuis les États-Unis où elle habite désormais.
À Dazed, Sonita raconte avoir découvert le rap avec Eminem, Missy Elliott ou M.I.A.. Elle ajoute qu’en Iran, son travail ne lui permettait pas de découvrir grand-chose. C’est donc quasi-instinctivement qu’elle a écrit ses premiers morceaux, plus inspirée par la colère que par de quelconques références musicales. Elle explique : « quand je commence à écrire, les paroles font 5 ou 6 pages, et je dois choisir quels mots sont les plus puissants« .
« Grâce à mon rap, la musique a changé ma vie. Je pense donc qu’il faut que je l’utilise pour aider d’autres filles »
Grâce à une bourse, la jeune fille étudie désormais dans l’Utah. Toujours très vocale sur la question des mariages forcés, la jeune rappeuse continue de produire de la musique en parallèle de sa scolarité. Aujourd’hui, son combat se poursuit en partenariat avec l’ONG Strongheart Group, via un projet qui porte son nom.