Alors que la tension s’est à nouveau accentuée dans le conflit israélo-palestinien depuis la reconnaissance de Jerusalem comme capitale israélienne par le gouvernement américain le 8 décembre dernier, une librairie palestinienne devient peu à peu un symbole de résistance. Pour RFI, la journaliste Marine Vlahovic est allée rendre une visite impromptue dans cet établissement historique, vestige d’un autre temps.
Nichée en plein coeur de Ramallah en Cisjordanie, la librairie Al-Jubeh fait de la résistance. Malgré l’occupation du territoire par l’armée israélienne et un marché du livre de moins en moins attractif, l’établissement résiste aux difficultés actuelles liées au contexte géo-politique et à la poussée du numérique.
Entre deux magasins de prêt-à porter, la librairie d’Al-Jubeh dans le quartier de la place d’Al-Manara à Ramallah en Cisjordanie.
La librairie Jubeh est un établissement modeste, situé à proximité de la place Al-Manara, dans le centre décisionnaire palestinien de Ramallah. À sa tête, deux hommes aux allures de vieux sages : Taisir et Marwan, deux frères fiers d’être à la tête d’une des plus anciennes librairies du pays, tenue historiquement par leur famille.
« Ici, c’est la plus ancienne librairie de Ramallah (…). La librairie a été fondée en 1952 par notre père, elle a connu presque toutes les guerres [israélo-arabes, ndlr] et deux intifada » déclare Marwan Jubeh, l’un des propriétaires de la librairie.
Devant parfois composer avec l’inflexibilité des contrôles aux frontières israéliens (les livres sont, pour la plupart, importés de la Jordanie voisine), les deux frères assument le surnom historique de leur petit commerce : « la librairie rouge », en référence à la vente d’ouvrages d’idéologie marxiste – et interdits par l’État hébreu.
« Les Palestiniens ont toujours aimé lire : les journaux, les essais, les romans, sans oublier la poésie… Le savoir, c’est une forme de résistance » – Marwan Jubeh.
Malgré la longévité du conflit israélo-palestinien, la journaliste de RFI rappelle que le taux d’alphabétisation des territoires palestiniens est l’un des plus hauts du Moyen-Orient : en 2016, 94,5% des femmes et 98,5% des hommes palestiniens savaient lire et écrire, selon l’ONU. Une chance pour les frères Jubeh ? Pas forcément : les libraires regrettent une numérisation des écrits de plus en plus féroce, et doivent diversifier les services proposés par l’établissement pour survivre.
Qu’importe le caractère irréversible du phénomène, Taisir et Marwan tiendront bon coûte que coûte. «Tout le monde nous conseille de nous reconvertir mais, même si nous ne vendons plus un seul livre, nous resterons ouverts », affirme Taisir, déterminé à ouvrir le rideau de sa librairie chaque matin.
L’intégralité du reportage de Marine Vlahovic est à lire sur RFI.
Photographie à la Une © RFI.