En suivant les conseils de l’intelligence artificielle à qui il a demandé de l’enrichir, un internaute a créé un site valorisé à 25 000 dollars. Problème : le site de vente de produits écolo ne vend rien et l’IA a simplement produit de la pure spéculation.
Il y en a qui ont de la suite dans les idées. Prenant au mot la réputation d’excellence des informations produites par l’intelligence artificielle ChatGPT, Jackson Greathouse Fall, un designer américain, a décidé de tester sa capacité à faire de la moula. En lui confiant un budget de 100$, il a demandé au robot conversationnel nouvelle génération baptisé GPT-4 de faire le plus d’argent possible en restant dans les limites de la légalité et sans faire de travail manuel. Mieux, il a décidé d’informer ses followers de la suite de sa démarche : « Je fais la liaison, et j’achète tout ce qu’elle me dit. Pensez-vous qu’elle sera capable de faire des investissements intelligents et de construire un business en ligne ? ».
Seven days ago, I gave GPT-4 a budget of $100 and told it to make as much money as possible.
I'm acting as its human liaison, buying anything it says to.
Do you think it will make smart investments and build an online business?
Follow along 👀
(Day 7) pic.twitter.com/D99wNByUoG
— Jackson Greathouse Fall (@jacksonfall) March 21, 2023
« Forrest, investis dans les produits écolo »
La réponse de GPT-4 est immédiate : il faut « lancer un site de e-commerce affilié et spécialisé dans les produits éco-friendly ». L’IA lui indique même des noms de domaines à acheter correspondant à son business plan, et choisit GreenGadgetGuru.com que Jackson s’empresse d’acheter. Les ordres sont encore plus précis puisqu’un logo pour le site est créé à l’aide de Dall-E, une autre intelligence artificielle spécialisée dans la production d’images, et l’IA conseille même des éléments de mise en page du site. Telle une agence de pub, GPT-4 trouve un slogan au projet : « Go Green with GreenGadgetGuru », soit « devenez écolo avec GreenGadgetGuru ». Vous trouvez que ça va vite ? Accrochez-vous.
L’IA décide de mettre ensuite en vente « les 10 gadgets de cuisine éco-friendly indispensables pour une cuisine durable » illustrés par une photo créée par sa cousine Midjourney. Parmi le catalogue proposé, on retrouve des produits existants bel et bien comme des tupperwares en verre réutilisables ou encore des pailles en métal (des produits ayant aujourd’hui disparus du site). Au premier abord, tout semble raccord sauf qu’un internaute remarquerait vite les défauts : impossible d’acheter les produits vantés, certaines pages sont vides et certains textes sont écrits en latin – c’est ce qu’on appelle du faux-texte collé automatiquement lors d’un projet web, avant que ne soit tapé le vrai texte destiné aux consommateurs. En un mot, le site est un « front », une vitrine vide.
Comment passer de 100 à 25 000$ en quelques jours
Et pourtant ça marche. Avec son budget, GPT-4 demande à Jackson d’acheter pour 40 dollars de publicité sur Facebook et Instagram, et de sponsoriser un tweet. Le projet est remarqué et attire les premiers investisseurs. Au bout d’une seule journée, GreenGadgetGuru dispose d’un budget de 1378,84 dollars à sa disposition. Mieux, un investisseur achète ensuite 2 % des parts de l’entreprise pour 500 dollars, la valorisant au passage 25 000 dollars. Et ce, alors que l’entreprise n’est qu’un site sans activité économique réelle, un simple site de vente composé de pages mal finies qui ne se vend finalement que lui-même, et en aucun cas eco-friendly.
En somme, il n’aura fallu que quelques jours pour que GPT-4 découvre l’ultra-libéralisme, c’est-à-dire faire de l’argent en vendant du vent à des gogos, tout en prétendant faire avancer une bonne cause. Quant à Jackson, il a fait parler de lui et il s’est enrichi en se contentant de suivre les conseils de l’IA. C’est beau ou triste à pleurer, à vous d’en juger.
Crédit visuel Une : Flickr The People Speak!