Le cliché du Parrain a la vie dure, mais dans vie réelle, la mafia n’a rien de très classe. De temps en temps cependant, les quotidiens transalpins relaient des histoires dignes d’un roman de gangsters. La semaine dernière, le Corriere della Sera révélait l’existence, près de Naples, d’un couple de perroquets dressé à dire « Je vais te tuer » – il servait à intimider les citoyens qui refusaient de payer l’impôt local. Cette fois, le quotidien chronique l’étonnant parcours de Giuseppe Puglisi, un boss de la mafia surnommé « Melingiana » (l’Aubergine, en calabrais).
Puglisi, 53 ans, a été arrêté la semaine dernière, lors d’un coup de filet de la police italienne, avec 38 autres personnes, toutes accusées d’accointances avec la N’Drangheta calabraise – la mafia italienne réputée la plus cruelle. Dans sa petite ville, l’homme était une figure. Mais pas pour ce qu’on croit. Raison de sa popularité : une présence infaillible, chaque week-end, aux sessions de volontariat de la Croix-Rouge locale. Toujours muni d’une Bible, connu pour être affable, il avait gagné le privilège de grimper dans les ambulances – et à ce que dit le Corriere, il sauvait même des vies avec un défibrillateur.
A la Croix-Rouge de Cermenate, la ville du Nord de l’Italie où il s’était établi, on loue ses vertus. Puglisi est « bonhomme », « sans aucun signe de dangerosité », insistent les responsables de l’association. En attendant que l’affaire soit réglée, ils ont suspendu – mais pas radié pour autant – ce cliché de la figure romanesque du mafieux, crapule jusqu’au samedi, professionnel de l’Ave Maria le dimanche. L’écrivain Leonardo Sciascia, qui publiait en 1961 le Jour de la Chouette, premier roman italien à aborder frontalement le thème de la mafia, ne l’aurait sûrement pas renié.