Son nom ou son visage vous disent peut-être quelque chose : Martine Landry était poursuivie pour « délit de solidarité ». Elle risquait la prison pour avoir aidé, en 2017, deux migrants guinéens mineurs à la frontière italienne. La procureur n’a finalement requis aucune peine contre la militante d’Amnesty International. C’est la bonne nouvelle de la journée.
Les faits remontent à l’année dernière, quand Martine Landry avait recueilli à la frontière italienne deux jeunes Guinéens. La militante a toujours affirmé avoir, à ce moment-là, attendu les deux mineurs au niveau du panneau France (côté français, donc). Un élément en apparence anodin qui, dans le cadre de ce procès, revêt une importance cruciale : on lui a reproché d’avoir convoyé les deux Guinéens de la France à l’Italie. Elle était depuis poursuivie pour « délit de solidarité » :
« Juridiquement, le délit « de solidarité » n’existe pas. Mais cette expression est utilisée pour dénoncer les poursuites et les condamnations de celles et ceux qui viennent en aide à des personnes étrangères en situation irrégulière en France » explique l’ONG Amnesty International.
Aider quelqu’un en situation irrégulière est une infraction pénale en France. Pourtant, la loi française prévoit que dans certaines situations, il soit impossible de condamner une personne pour l’aide qu’elle fournit.
Pour ce faire, et ne pas risquer de condamnation, il faut que :
– la personne à qui est « destinée l’assistance » soit déjà sur le territoire français.
– l’aide fournie ne doit, en aucun cas, être accompagnée de contrepartie directe ou indirecte (comme une rémunération).
– la nature de cette aide est strictement limitée à « des conseils juridiques, des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux pour assurer des conditions de vie dignes et décentes, ou si elle a fourni toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique », explique Amnesty International. Des nuances qui laissent planer de nombreuses parts d’ombre, que soulève l’ONG sur son site web.
Martine Landry – Amnesty International
La parquet a finalement requis la relaxe pour la militante, la procureur estimant que :
« Martine Landry était le dernier maillon de la chaîne« , contrairement à « des acteurs qui ont participé à ces manœuvres et pas présents au tribunal », – rapportent nos confrères de Franceinfo.
Une décision qui tombe à pic alors que s’ouvre aujourd’hui à Gap le procès de trois militants, poursuivis pour avoir aidé des migrants à traverser la frontière française. « Un procès à forte tonalité politique« , explique Le Monde.
Mais ce n’est pas l’unique raison pour laquelle le cas de Martine Landry fait particulièrement écho à l’actualité… Vous n’avez pas pu passer à côté de cette information : il y a quelques jours, Mamadou Gassama, un Malien sans-papier a fait preuve d’un héroïsme notable en venant en aide à un enfant suspendu à la balustrade d’un balcon. Il a été reçu dès le lendemain à l’Elysée, a été naturalisé français et devrait intégrer les sapeurs-pompiers parisiens.
Un geste considéré comme opportuniste pour beaucoup qui, loin de vouloir minimiser le courage de Mamadou Gassama et de vouloir remettre en question sa naturalisation, dénoncent l’hypocrisie du gouvernement, alors que la très controversée « Loi Asile Immigration » est en passe d’être adoptée par le Sénat.
Illustration de Tjeerd Royaards
Le procès de Martine Landry – inédit pour un.e miliant.e d’Amnesty International – questionne : à la fois sur la réponse que souhaite adopter le Pays des Droits de l’Homme vis-à-vis des réfugiés affluant aux frontières européennes ; mais aussi sur les valeurs de solidarité, d’entraide et de fraternité qu’il souhaite véhiculer.
Pour terminer sur une note d’humour, on vous partage cette Une du média satirique LeGorafi qui nous a fait sourire :
Image à la Une : Amnesty International