Tandis que l’appli pourrait bientôt être bannie aux États-Unis, des experts alertent sur les conséquences de cette interdiction : un Internet encore plus divisé qu'aujourd'hui au niveau mondial, avec l’Occident d’un côté et la Chine de l’autre.
Sommes-nous en train de scroller vers la fin du web tel que nous le connaissons ? Dangers pour la sécurité des données personnelles, espionnage de journalistes… TikTok – filiale du groupe chinois ByteDance – joue gros en ce moment, avec une menace d’interdiction pure et simple aux États-Unis. Et tandis que Shou Zi Chew, son PDG, a tenté de défendre l’appli lors d’une audition devant le Congrès américain, fin mars, le réseau social continue de « jouer l’opinion contre les gouvernements occidentaux » avec une campagne auprès de ses propres utilisateurs, rapporte Le Monde.
Mais au-delà de l’avenir de TikTok outre-Atlantique, certaines répercussions ont de quoi faire flipper : l’interdiction pourrait « mettre en péril le futur de l’Internet ouvert et mondial » d’après certains experts. D’abord, des représailles pourraient vite être annoncées du côté de Pékin, dans un contexte géopolitique tendu après l’affaire des ballons espions chinois abattus aux État-Unis. Alors que la plupart des réseaux sociaux occidentaux sont déjà interdits en Chine, ils ne le sont pas tous à Hong Kong : selon une source anonyme citée par le magazine économique Fast Company, l’accès aux applis encore disponibles pourrait être désormais coupé.
Pékin versus Silicon Valley
D’après Katja Muñoz, chercheuse au sein du German Council on Foreign Relations, un think tank allemand, la riposte risque d’aller plus loin : des pays sous l’influence économique de Pékin pourraient également être incités à renoncer aux réseaux sociaux américains. Alena Epifanova, une autre chercheuse du German Council on Foreign Relations interrogé par Fast Company, pointe du doigt le cas de la Russie. L’État dirigé par Vladimir Poutine, qui vient d’interdire l’utilisation d’iPhones au sein du Kremlin, pourrait renforcer sa « coopération technologique » avec la Chine, avec comme conséquence « une surveillance accrue » des internautes dans les deux pays.
Selon cette chercheuse, l’interdiction de TikTok aux États-Unis pourrait ainsi servir d’argument pour la Chine et la Russie afin d’accélérer l’avènement d’un « splinternet » : un morcellement du web avec des règles très différentes et « des niveaux d’information très différents » dans les pays où la censure sévit. Pour ce qui est de la France, le gouvernement a récemment interdit TikTok sur les téléphones des fonctionnaires d’État, parmi d’autres « applis récréatives » comme Netflix. Un autre signe annonciateur de la cyber-apocalypse ?