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Société
Par Jalal Kahlioui

Médine vous invite dans son long périple à la rencontre des Rohingya

Alors qu’il vient de sortir le premier clip de son prochain album Prose Elite, Medine est reparti parcourir le monde pour illustrer son deuxième extrait : « Enfant du destin (Nour) ».

Pour rappel : « Enfant du destin » est un fil rouge des albums de Médine, grâce auquel, à l’aide d’une fiction, il conte les situations géopolitiques complexes que connaissent (ou ont pu connaître) des milliers d’enfants autour du monde. Qu’ils soient en Afrique, en Amérique ou en Asie du Sud-Est, ces enfants du destin deviennent ainsi les témoins des ravages d’une Histoire et d’une real politik internationale implacables.

Pour ce faire, le Havrais a décidé de mettre le cap sur la Birmanie avec l’idée de mettre la lumière sur le sort de la minorité musulmane des Rohingya. À l’aide de ses réseaux sociaux, devenus carnets de bord numériques, le rappeur raconte son périple et met des mots sur les émotions ressenties pendant ce voyage.

Pour rappel : la communauté des Rohingya, originaire de l’État Arakan, souffre de discrimination et de persécutions, et est reniée par les différentes juntes militaires birmanes depuis des décennies.

Si une partie d’entre eux fuit ces conditions misérables pour tenter de trouver refuge au Bangladesh (près de 33 000 ce mois-ci), une grande majorité d’entre eux (estimée entre 800 000 et 1,3 million) doit faire face aux pressions de l’État birman qui ne les reconnait pas en tant que minorité nationale. L’ONU a d’ailleurs mis en lumière la menace qui pèse sur cette communauté en alertant en novembre dernier sur le « nettoyage ethnique », par la voix du représentant des Nations Unies au Bangladesh.

12 décembre 2016 – Yangon Même les yeux fatigués, je ne manque rien du spectacle que m’offre Yangon. Une ville que je ne connais qu’à travers la vision que Sylvester Stallone m’a proposé dans le dernier volet de la saga Rambo. Une ville que je croyais être la capitale jusqu’à ma venue ici, elle n’est en fait que capitale économique. La ville de la nobelisée Aung San Suu Kyi est aussi colorée que les sarong de cette dernière. Les robes orange safran des moines hommes se mêlent à celles des bonzes femmes qui, elles, portent l’habit religieux de couleur rose pâle en s’abritant sous leurs parapluies en osier. De nombreux stands jonchent la route jusqu’à l’hôtel où nous logeons. Fleuristes, potiers, fabricants de statue, forgerons défilent devant nous et donnent la sensation d’être au salon de l’artisanat version birmane. Notre hôtel est situé face à une barre d’immeuble dont la pierre est recouverte de traces de gaz d’échappement et autres dépôts de pollution, ce qui lui donne un aspect grisâtre très ancien. On pourrait même croire qu’il s’agit d’infrastructures classées au patrimoine mondial tellement la vétusté des lieux laisse croire à une architecture d’un autre siècle. Le moindre centimètre carré au pied des immeubles est exploité par les restaurateurs de street food. Grillades sur charbon de bois, breuvages de fruits locaux, fritures en tout genre, etc. Je rejoins la pagode principale du quartier gardée par 2 gigantesques statuts représentant des animaux chimériques de la tradition bouddhiste certainement. La pagode Shwedagon est le centre névralgique de l’endroit où je loge, tout semble mener à elle. Le rooftop de l’hôtel en a fait son attraction principale en offrant de jour comme de nuit une skyline coiffée d’un dôme aux dorures étincelantes. C’est ici que je rencontre Ali du collectif HAMEB de Belgique qui nous a précédé d’un jour pour mieux préparer l’opération humanitaire. Un quarantenaire gigantesque à l’accent belgo-marocain dont la stature sait mettre en confiance pour ce type de voyage dit à « risque ». Ali connait très bien le terrain, il est déjà venu 4 fois en Birmanie. C’est le quatrième belge avec qui je pars en séjour cette… (Suite sur FB)

Une photo publiée par Médine (@medine_officiel) le

Au travers de ses écrits, Médine raconte à ses abonnés la réalité de ce qu’il découvre : des Rohingya livrés à eux-mêmes, parqués dans des camps militaires où il lui est très difficile d’accéder avec son équipe d’associatifs. On apprend ainsi que tout est fait pour contrôler l’aide humanitaire que pourraient recevoir les hommes, femmes et enfants dans un pays dirigé par Aung San Suu Kyi, pourtant prix Nobel de la paix en 1991, de plus en plus contestée pour son immobilisme sur la question.

« La version officielle du gouvernement, c’est que les Rohingya sont regroupés en ces endroits pour leur sécurité car des tensions inter-ethniques les exposent à des violences au contact du reste de la population. En réalité, c’est une population privée de droits fondamentaux à qui on ne reconnaît pas la nationalité, ni le droit de travailler, le droit à la terre, de se marier, de circuler librement… » – Médine, le 16/12/2016.

Publié par Medine sur vendredi 16 décembre 2016

Au-delà des difficultés éprouvées pour la mise en contact avec ces populations, on découvre une histoire sensible entre un artiste et une communauté représentée par ses enfants, qui lui ouvrent naturellement leur porte. Anecdotes et échanges humains se succèdent, laissant présager des sourires d’enfants contrastant avec la réalité du terrain.

« Autant je trouve débile la folle vague des filtres Snapchat qui s’est abattue comme un châtiment sur la jeunesse contemporaine, autant je suis passé pour Arturo Brachetti avec l’appli’ jaune au fantôme en screenant tous les visages juvéniles m’entourant. » – Medine, le 16/12/2016.

#rohingya

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Cet été, la question des Rohingya avait été évoquée à l’occasion du retour de l’humanitaire français Moussa, en août dernier. L’humanitaire était retenu près de sept mois par les autoritaires bangladaises, où ses activités avaient été considérées comme « suspectes » en faisant le lien avec des activités terroristes. Les Rohingya étaient le sujet principal de la mission de ce Français, alors engagé par l’association BarakaCity. Moussa avait été soutenu par de nombreux rappeurs comme Médine, Nekfeu ou Mokobé, qui avaient notamment organisé un concert de soutien en son honneur en mars dernier, dans sa ville de Montreuil.

15 décembre 2016 – Sittwe Une fois toutes les photocopies de nos passeports effectuées, nous nous rendons au bureau d’un certain Caw Caw (à prononcer Coco). Il débloquera notre situation en tant qu’interlocuteur privilégié d’ONG étrangère dans la région d’Arakan. Il ne manquera pas de sermonner Nordine à notre intention concernant le fait que désormais nous sommes sous sa responsabilité et que tenter de passer les checkpoint sans autorisation risquerait de nous attirer de gros soucis. Même si je lui suis reconnaissant de nous avoir fourni les accès, je crois surtout qu’il s’agit d’une technique de représentant en alarme de maison. Quand on a quelque chose à vendre, on s’arrange pour prévenir d’un grand danger qui serait inévitable sans le service proposé. D’autant plus que la dimension militante de dénonciation du gouvernement du collectif HAMEB semble poser problème et qu’il faudrait plutôt « s’en tenir aux actions humanitaires ». Toutefois, l’échange avec ce Caw Caw est cordial et très intéressant, sa connaissance du sujet lui permet d’être clairvoyant sur les solutions à mener pour une réconciliation entre les Rakhines et les Rohingya. Toutes ces discussions m’interrogent sur l’utilité d’un futur morceau sur le sujet et me poussent à renouveler mon intention pour être le moins subjectif possible dans ce contexte encore à vif… J’espérais pouvoir accéder au camp aujourd’hui mais l’autorisation nous sera délivrée seulement le lendemain. Nous passons donc outre les mises en garde de début de journée et contactons le dénommé Zaw Zaw. Ne me demandez pas pourquoi tous les nicknames du coin ont une double répétition syllabique, je ne pourrais pas vous répondre. D’ailleurs, même la serveuse du restaurant RV s’appelle Saw Saw. Le fameux Zaw Zaw devait constituer le dernier recours à emprunter en raison de son appétence au papier de banque. Contrefaçon de snap bag des Houston Rockets vissée sur la tête, laissant apparaître une frange humide sur son front, longyi (pagne pour homme birman) vert, bouteille à petits carreaux et sur le dos un chandail au croisement entre le t-shirt, la chemise et le polo, visage rond, ventre bedonnant, il nous … (Suite sur FB).

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Le clip de Médine est donc aussi un coup de projecteur sur ce peuple victime de massacres et que l’ONU a classé, en 2015, comme étant le plus persécuté au monde. Plutôt que d’attendre la sortie de la vidéo, l’artiste a préféré sensibiliser sur le sujet et raconter, au travers de ses notes publiées sur ses réseaux sociaux, ses sensations et expériences. Outre son clip, Médine réalise aussi une action humanitaire auprès des Rohingya.

16 décembre 2016 – Sittwe Nos autorisations viennent de recevoir les bonnes signatures. La durée ? 2 opérations sur 2 jours sous la responsabilité (sous escorte déguisée) d’une organisation locale. L’une dans un village et l’autre dans un camp. Les 2 mots sont différents et ne désignent pas la même situation. Le village constitue une vitrine pour l’état Rakhine qui dirige les ONG vers celui-ci pour montrer qu’il n’y a pas de violation de droit. Mais la population reste très pauvre et soumise à des contrôles de déplacement. Tandis que les camps sont des populations déplacées suite à un événement violent. La version officielle du gouvernement, c’est que les Rohingya sont regroupés en ces endroits pour leur sécurité car des tensions inter-ethniques les exposent à des violences au contact du reste de la population. En réalité, c’est une population privée de droits fondamentaux à qui on ne reconnaît pas la nationalité, ni le droit de travailler, le droit à la terre, de se marier, de circuler librement… Notre arrivée au village fut précédée par un convoi de camions ayant déchargé les denrées alimentaires listées au préalable par les habitants eux-mêmes. Ainsi, riz, piment, sel, huile, lentilles vont être distribués à plus de 140 familles, soit environ 500 personnes. Arrivé après coup, la logistique me paraît donc moins chevaleresque. J’avais dans l’esprit une scène de liesse en voyant arriver les remorques chargées de sacs jaunes et blancs. Déformation hollywoodienne certainement d’un Charity-business sur-marketé par nos amis les vedettes. J’ai en tête les mises en scène de BHL et Bernard Kouchner, sacs de riz sous le bras. D’ailleurs, Florin, le réalisateur du clip, m’affublera de ce sobriquet moqueur me voyant porté les sacs de riz pour aider une dame : « BHL ». Réflexion à laquelle je rétorquerai « si je suis BHL, tu es Arielle Dombasle ». Je chasse tous ces stéréotypes de mon esprit et m’emploie à prendre des notes et photos. Les familles font la queue devant la cour de la mosquée, centre névralgique du village où tous les chemins semblent mener. Munis de tickets numérotés, ils signent de leurs empruntes un registre tenu par notre… (Suite sur FB).

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La suite des aventures de Médine est à suivre sur ses comptes Facebook, Instagram et Snapchat : medine_officiel. 

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