A 28 ans, Meriem Bennani expose solo à Brooklyn. Cette artiste marocaine, installée à New York depuis six ans, parodie la télé-réalité, le mariage, le port du hijab et des clips célèbres. Avec son nouveau projet "Siham & Hafida", elle revient sur le quotidien de deux femmes marocaines.
La réalité est parfois trop ennuyeuse, pourquoi ne pas la déformer ? C’est le leitmotiv de Meriem Bennani qui prend pour modèle la vie réelle. Son inspiration, elle la puise au Maroc, dans sa famille, mais l’expose en ce moment à New York dans la galerie The Kitchen.
Sa nouvelle création « Siham & Hafida » nous plonge dans l’intimité de deux femmes qui pratiquent l’art de l’Aïta, une poésie parlée.
Deux femmes de générations différentes confrontent leur vision de la société marocaine sans filtre. « En tant que filles, on est un peu emprisonnées dans le monde des salons, un monde très intéressant où beaucoup de choses se passent, et c’est aussi cela qui m’inspire » explique l’artiste. Ses vidéos de détournement, pleines d’humour et de poésie, nous offrent un bel aperçu des bouleversements opérés dans le pays depuis cinquante ans.
Des papillons s’échappent de la bouche d’une chanteuse, Meriem Bennani, Siham & Hafida, 2017.
Cette jeune femme de 28 ans, qui a passé cinq ans à l’école des Arts Décoratifs de Paris avant d’étudier à la Cooper Union à New York, crée des clips animés, proches des GIF, et des cartoons pour susciter le rire et l’auto-dérision. Sur les réseaux sociaux, elle a notamment détourné des vidéos comme le clip « Drunk in love » de Beyoncé…
Beyoncé (feat. Jay-Z) « Drunk in Love » Unofficial Basket Ball Video from Meriem Bennani on Vimeo.
Mais l’artiste aime surtout s’atteler à des sujets sensibles, comme le Hijab, le voile islamique. L’une de ses créations les plus connues : la vidéo « Fardaous Funjab » (contraction de « fun » et de « hijab »), dans laquelle elle parodie une émission de télé-réalité qui met en scène Fardaous, une designeuse marocaine un peu loufoque.
Fardaous fabrique des hijabs « funs et modernes » pour toutes les blogueuses mode voilées, les « hijabistas ». Exemple : le « Tennis Funjab », un hijab avec une extension sur la tête pour stocker les balles de tennis…
Il y a aussi le « Hijab Extra Hair », avec des étages de cheveux ajoutés via une télécommande, les gâteaux d’anniversaire Hijab, ou encore le Hijab Metallica… Derrière l’humour, l’artiste voulait dédramatiser ce voile souvent décrié, quitte à choquer.
L’année dernière, Meriem Bennani avait aussi créé « Fly », une grande installation vidéo tournée à l’iPhone et construite comme une aire de jeu dans le MoMA PS 1, le musée d’art moderne de New York. Comme des loupes déformantes de la réalité, ses œuvres mettent parfois mal à l’aise, mais servent un propos plus profond : l’acceptation de l’autre. Avec, si possible, un peu d’humour.
Meriem Bennani, Siham & Hafida, 2017 |
Siham & Hafida de Meriem Bennani, jusqu’au 21 octobre à la galerie The Kitchen à New York.