Pour la nouvelle année, quatre grands médias européens se sont associés pour donner de la voix aux réfugiés.
Soixante-cinq millions. Le nombre de personnes réfugiées dans le monde représente presque le nombre total d’habitants en France. S’ils constituaient un pays, les réfugiés se hisseraient à la 21ème place des pays les plus peuplés. Aujourd’hui, presque un humain sur cent a dû fuir son pays. En France, en 2017, les autorités ont enregistré près de 100 000 demandes d’asiles, un record.
Autant de statistiques qui rappellent l’urgence et le caractère mondial du sort de ceux qui ont dû faire face à des régimes politiques hostiles, aux conflits armés, et aux exactions les plus terribles. Pour ce début d’année 2018, quatre titres de la presse européenne ont décidé de donner la parole aux réfugiés.
Le Monde, The Guardian, Der Spiegel et El Pais (soit les quotidiens les plus emblématiques des quatre pays européens les plus puissants) ont permis à 18 réfugiés, disséminés dans le monde entier, de se confier sur leur situation actuelle. Les interviewés ont aussi été invités à partager leurs vœux pour l’année à venir. Parmi les personnes interrogées, on retrouve des Irakiens, Libyens, Syriens mais aussi des personnes issues de Centrafrique, du Yemen, de Colombie, d’Iran et d’Ukraine.
À 24 ans, Ruaa Abu Rashed a fui l’horreur de la Syrie pour rejoindre l’Allemagne en 2013.
Ruaa Abu Rashed, photographiée en Allemagne, après avoir quitté la Syrie.
© Maria Feck.
« Ma famille et moi sommes arrivés en Allemagne en novembre 2013. J’ai vu un de mes meilleurs amis mourir à la guerre et j’ai failli me noyer dans la Méditerranée. J’ai appris l’allemand et j’ai travaillé pour atteindre mon objectif : étudier la médecine pour aider les personnes dans le besoin. Comme mes notes étaient bonnes mais pas extraordinaires, j’étudie finalement la technologie médicale. Cela me plaît, mais j’ai toujours l’espoir de devenir médecin. Je vais essayer de nouveau au printemps, je croise les doigts. » – Ruaa Abu Rashed interrogée par Eva Thöne.
Le jeune Narul Amin a douze ans. Il vient de Birmanie et s’est réfugié au Bangladesh.
Le jeune Narul Amin a dû quitter ses chèvres pour fuir la persécution en Birmanie. © Poppy McPherson.
« Je ne suis pas heureux au Bangladesh. Mon pays et mon village me manquent tellement. J’ai laissé deux chèvres, Lal Fari et Hasha, dont je me suis occupé quand elles étaient petites. Je ne sais pas si elles sont vivantes ou mortes. Je dois retourner en Birmanie et vivre à nouveau dans notre village. Si le gouvernement birman nous rend nos droits, nous serons en sécurité là-bas. J’aime aller à l’école. Sinon, je n’aime rien ici au Bangladesh… » – Narul Amin. Propos recueillis par Verity Bowman.
Anastasia Gundar (27 ans) a fui la guerre en Ukraine en 2015 et les violences perpétrées (depuis 2014) dans la région du Donbass pour se réfugier en Russie voisine.
Anastasia Gundar est une réfugiée ukrainienne en Russie. © Jack Losh.
« J’ai fui l’est de l’Ukraine en février 2015, lorsqu’il y avait des combats sévères dans le Donbass. J’espère retrouver une vie normale, une vie où je ne suis pas constamment nerveuse, où le sol ne cède pas en permanence sous mes pieds. Je crains pour ma famille à Louhansk. Les combats sur la ligne de front créent certains risques, mais je suis plus préoccupée par l’impact de la lutte pour le pouvoir entre les groupes rebelles. Plus je suis loin de ma famille, moins je peux aider et moins je comprends leur vie. »
Pour avoir voulu rejoindre l’Australie illégalement en fuyant l’Iran, Behrouz Boochani, 34 ans, est retenu dans un centre de détention en Papouasie-Nouvelle-Guinée. L’homme est détenu sur l’île de Manus depuis cinq ans. Selon lui, le gouvernement australien retient près de deux mille personnes dans ce centre.
Behrouz Boochani, Iranien retenu sur l’île de Manus par les autorités australiennes. © Jason Garman, AFP.
« Je rêve que tous les gens qui ont quitté leur pays à cause de la guerre, de la discrimination et des persécutions se retrouvent dans un endroit sûr qui leur donnera l’occasion de commencer une nouvelle vie. À l’échelle mondiale, tant de gens sont morts à cause de la guerre et des millions de personnes sont devenues des réfugiés… Je souhaite que 2018 soit une année de paix, de justice et de compassion pour tous les réfugiés dans le monde. » – Behrouz Boochani, interviewé par Jack Losh.
À défaut de pouvoir donner d’un peu de son temps aux réfugiés (quoique les résolutions de début d’année sont encore d’actualité), on vous laisse ci-dessous une petite liste (non-exhaustive) d’associations qui luttent en France au quotidien pour l’amélioration du sort des réfugiés. Qu’ils s’occupent de la distribution de vêtements, de l’aide sanitaire et/ou psychologique, ou de l’aide aux démarches administratives, les associatifs auront toujours besoin de dons pour mener au mieux leurs actions :
France Terre d’Asile.
Le Baam ( Bureau d’accueil et d’accompagnement des Migrants).
L’école Thot qui donne l’opportunité aux réfugiés d’obtenir des diplômes de maîtrise du français.
Le Samu Social qui assure l’hébergement d’urgence et l’accompagnement des réfugiés sans domicile.
L’intégralité des témoignages des dix-huit réfugiés est à lire sur le site du Monde.
Photographie à la Une : le jeune Birman Narul Amin, réfugié en Birmanie. © Poppy McPherson.