David Fincher revient avec une nouvelle série, Mindhunter, sur les débuts du métier de profiler. Un thriller au ralenti où l'on ne voit pas les monstres, mais où l'on entre dans leur tête pour tenter de retrouver l'homme qui s'y cache.
La première scène de Mindhunter semble déjà vue : Holden Ford (Jonathan Groff), jeune négociateur du FBI, est envoyé sur une prise d’otages. Un cordon de sécurité, des snipers, un négociateur et un ravisseur. Celui-ci est filmé de loin, personne ne peut l’atteindre – pas même l’agent. Une mise à distance voulue, comme une mise en abîme de la série. La négociation tourne mal, Holden est mis sur la touche, son supérieur lui conseille d’aller enseigner et d’enquêter sur le profil des criminels les plus sombres du pays.
Nous sommes à la fin des années soixante-dix, c’est le début du « profilage » de ceux qu’on appellera bientôt « tueurs en série ».
Mindhunter.
Des séries sur les serial killers, on en a vu beaucoup : Dexter, Hannibal, True Detective... Mais toutes dérivent, à des degrés divers, d’une matrice popularisée par David Fincher, l’auteur de Se7en et Zodiac. Quatre ans après la série House of Cards, déjà sur Netflix, le réalisateur culte revient avec Mindhunter, une adapation de l’ouvrage Agent spécial du FBI : j’ai traqué des serial killers de John E. Douglas. Dès les premières images, on retrouve l’univers du cinéaste : une ambiance bleu noir, presque électrique, et un rythme lent. Dans Mindhunter, Fincher délaisse les scènes de crime au profit de l’esprit tortueux des tueurs. Ici, le sang n’apparait qu’en éclaboussures, comme cette tache sur la manche immaculée d’Holden Ford. L’agent a un physique de premier de la classe : cheveux gominés sur le côté, toujours propre sur lui, on le soupçonne de sentir le gel désinfectant.
Avec l’agent Bill Tench (Holt McCallany), un spécialiste des sciences du comportement, le duo incarne les Laurel et Hardy de la police, toujours en vadrouille dans les airs ou sur les routes, avec dans les oreilles un remix de la Cinquième Symphonie de Beethoven.
Ed Kemper.
Le premier monstre interviewé s’appelle Ed Kemper : un meurtrier nécrophile, incarcéré depuis cinq ans. « Vous avez l’air normal« , observe Holden. « Oui, j’avais une belle maison dans un beau quartier, des animaux domestiques, un travail, mais en même temps j’aspirais à une vie obscène et violente » . L’homme porte une moustache stricte, mais son physique bedonnant le rend presque sympathique. Le condamné parle de ses victimes comme il décrirait son sandwich aux oeufs.
« J’ai décidé de me rendre parce que je désespérais à l’idée qu’on m’attrape » poursuit-il. Dans Mindhunter, ce sont les dialogues qui font peur.
La guerre du Vietnam ne suffit plus à expliquer la folie des hommes. Écrite par Joe Penhall et Jennifer Haley, la série illustre cette quête de sens dans un monde en pleine mutation. « Avant, les cinquante coups de couteau, c’était soit l’amant, soit l’ex-associé ; aujourd’hui, ça peut être un facteur mécontent… » explique un criminologue dans la série. Un terrible parallèle avec notre époque…
Mindhunter, de Joe Penhall et Jennifer Haley. Les dix épisodes sont en intégralité sur Netflix.
Image à la Une : Netflix.