Ils ont pris le contrôle d’Internet depuis plusieurs années et ne le lâchent pas.
Les chèvres et les pandas roux ont bien essayé de les détrôner mais rien à faire : les chats, ces emmerdeurs ingrats et dédaigneux, et alors qu’ils ne sont même pas les meilleurs amis de l’homme, restent les seules vraies stars immuables de l’Internet.
Existe-t-il un lobby du chat ? Y’a-t-il des enjeux commerciaux, économiques ou politiques derrière tout ça ? Est-ce que cela change quelque chose à leur condition ?
C’est ce que nous avons essayé de comprendre…
Il y a quelques années, un jour de classe, mon professeur d’histoire de l’Art, Jeff Rian, a levé sa main dans les airs et nous a dit, sur le ton d’une révélation et à mesure qu’il déployait ses doigts :
« En peinture, si vous voulez faire du cash, y’a trois trucs qui marchent depuis toujours : 1/ les paysages, 2/ les femmes nues et 3/ LES CHEVAUX. »
Et je suis bien certaine qu’il avait raison.
L’art équestre apparaît avec les premiers artistes ; il est présent depuis toujours et dépeint la guerre, la conquête, la force : chargé de symboliques… Oui, c’est sûr, dans l’imagerie populaire, le cheval est roi ! Et pourtant…
Les années ont passé, la peinture subsiste, mais ce matin, j’ai envoyé un e-mail à Jeff Rian, en lui posant cette question qui me tenait à coeur :
« Is the cat the new horse ? »
(Oui Jeff, est américain et la phrase sonnait tellement mieux en anglais.)
Il m’a répondu qu’il pensait lui-même être devenu le cheval de son propre chat…
Car après tout, force est de constater qu’aujourd’hui, sur la toile, le cheval est quasi inexistant et a laissé sa place de grand préféré à tous les minous de la Terre.
Certains sont devenus des vedettes à part entière et ont même gagné de l’argent grâce à leur belle gueule :
En décembre 2011, Slate sortait un papier qui relatait que les chats n’étaient sans doute que les maîtres culturels du Net en réponse à Libération (qui propulsait les Félix et compagnie tout en haut de l’affiche) et tout en citant le point de vue métaphorique des Inrocks :
Pour analyser le succès du chat, la même explication revient souvent : il serait une sorte de métaphore du geek, comme l’écrivait Les Inrocks :
« Le chat est le seul être vivant digne d’affection pour un nerd sans pitié –ils partagent certaines caractéristiques communes : cruellement égoïstes, asociaux et poilus. »
Tous les médias étaient et sont toujours passionnés par la question !
C’est à se demander pourquoi tous les grands quotidiens n’ont pas un encart CHAT au milieu de leurs rubriques :
Une contradiction ?
Curieux, car lorsque l’on repense à notre imagerie enfantine et populaire, le chat n’est pas franchement l’animal le plus adulé.
Hormis les Aristochats qui sont plutôt sympathiques (bien que voyous), le chat endosse souvent, comparé au chien, le rôle du malin méchant sournois ou du gros débile de service…
En parcourant la Cat Culture du 21ème siècle quelque chose pourtant saute aux yeux : oui… il existe des chats sympathiques, mignons, chouchous, coquinous et figurez-vous qu’ils ont tous un point commun :
ILS SONT TOUS JAPONAIS !
Serait-ce alors « à cause / grâce » aux Japonais que la toile Internet est ainsi engloutie par la suprématie des chats ?
Cela tomberait sous le sens !
Quand on y pense, les japonais vouent un culte :
– aux chats (certainement pour narguer les chinois qui les mangent)
– au kawaï (certainement pour narguer les chinois qui sont un peu plus bruts de pomme.) (Mais chut, je n’aime pas faire de généralités…)
– et à l’humour absurde (certainement pour narguer les chinois qui en sont dépourvus…) (Oh, ça va, on rigole…)
De fait, on se retrouve avec ça :
Un animal vicieux qui se serait transformer en adorable petit être et serait alors devenu complètement manipulable.
Existerait-il un lobby japonais de « l’image chat » qui agirait dans l’ombre de tout soupçon pour affaiblir l’identité chinoise ? Pour dire, d’une façon plus qu’attendrissante : « Regardez, tout le monde aime les LolCats, donc forcément, tout le monde déteste les Chinois ! »
Hmm… c’est un petit peu tiré par les cheveux, ne nous emballons pas…
Pour nous, le chat devient alors un animal parfaitement méchant, parfaitement malin, mais parfaitement trop chou, parfaitement ridicule, parfaitement antipathique, parfaitement grotesque, mais parfaitement attendrissant, bref : parfaitement TOUT.
Son caractère prétendu méprisant et solitaire en fait la caricature d’un parfait dictateur dont toutes les aventures possibles peuvent devenir tout à fait hilarantes et au delà de son image de sale égoïste oublieux, le miaou reste tout de même cette merveilleuse petite boule de poil dont on voudrait tant se faire aimer (mais qu’on se contente souvent d’avoir en peluche). Un personnage de fiction suprême : le méchant gentil / le gentil méchant.
Cet animal totem est alors validé par la TERRE ENTIÈRE (sauf par Drake qui tient absolument à introduire sa chouette dans le cercle des animaux influenceurs) :
La « Owl Creativity » est peut-être plus fastidieuse. Encore que… :
Chargé de toutes les symboliques, le chat est ainsi déchu de toute vraie symbolique et devient l’acteur studio parfait :
On lui consacre des tas d’articles et quand il n’est pas moqué pour son mauvais caractère, il est érigé en super héros :
– Impossible de checker son compte Facebook sans être envahi(e) de news de toutes sortes concernant les chats.
– Impossible d’envoyer un texto à une copine sans être démangé(e) par l’envie irrésistible de compléter son texte par un petit émoticon tête de chat trop sympa.
– Impossible d’avoir un chat et de résister au BESOIN de lui faire un compte Instagram.
– Impossible de passer outre la kitty-fashion-alerte et penser échapper « aux indispensables de la semaine » :
Arrêtons de nous voiler la face : nous sommes chato-lobotomisés !
Je me suis demandée si cela changeait quoique ce soit à la condition de vie de nos charmants compagnons de vie ? Après tout, autant que ça serve à quelque chose !
J’ai appelé plusieurs animaleries de la région parisienne et de province en leur demandant si la vente de chats avait augmenté ces dernières années.
À Paris, « pas vraiment », m’a-t-on répondu sans m’en dire davantage et tout en soupçonnant que mon coup de fil soit une blague…
En province, « pas vraiment », m’a-t-on répondu sans m’en dire davantage et tout en soupçonnant que mon coup de fil soit une blague…
J’ai tout de même passé un appel à la SPA pour avoir leur son de cloche :
« Allô oui bonjour ! J’écris un petit article sur les chats, héhé et j’aimerais savoir si, à la SPA, vous aviez noté une croissance dans l’adoption des chats ces dernières années ou si pas du tout ? », je dis d’une traite.
(blanc… d’environ 7 secondes…)
« Euhhhhh….. vous ne quittez pas s’il vous plait… je vous passe le service communication. », me répond-t-on.
Le service de communication de la SPA m’apprendra par la suite, que l’adoption des chats est bel et bien en croissance depuis quelques années mais impossible d’expliquer pourquoi.
En Chine, les moeurs changent aussi… La cause animale se lève contre le trafic de chats (et de chiens) et intercepte des camions qui conduisent souvent plusieurs centaines de bêtes à une mort certaine.
Le chat reprend donc du poil de la bête et tant mieux pour lui!
Une question subsiste malgré tout : « Doit-on remercier les Japonais de tout ça ? »
Si oui : « Merci ! »
BONUS :
TUTO : « COMMENT FAIRE UNE BONNE VIDÉO DE CHAT » (avec peu de moyens, au bureau, et avec un chat peu incompréhensif).