Mardi 16 février, par 20 voix contre 15, le Sénat de l’État américain de Dakota du Sud a approuvé un projet de loi concernant l’utilisation des toilettes, des vestiaires et des salles d’eau, par les étudiants des écoles publiques. Le but : attribuer l’usage des commodités en fonction de « l’état physique de l’homme ou de la femme tel qu’il est déterminé par ses chromosomes et identifié à la naissance par son anatomie« .
Elle souhaite donc interdire aux personnes transgenres, même si celles-ci ne sont pas clairement citées par le texte, d’utiliser les toilettes de leur choix.
Le projet de loi propose la mise en place de toilettes individuelles et unisexes, mais dans des cas bien précis. Il faut que l’élève amène un papier signé de ses parents ou de son tuteur affirmant qu’il ne veut pas utiliser les toilettes allouées à son sexe « biologique »… et que cela ne représente pas une contrainte, notamment budgétaire, pour l’école. Après réception du projet de loi, le gouverneur républicain Dennis Daugaard dispose de 5 jours, soit jusqu’au 21 février, pour approuver ou rejeter le texte. S’il décide de le signer, le Dakota du Sud deviendra le premier État du pays à faire passer une loi de ce type.
Auparavant, Dennis Daugaard, 62 ans, avait déclaré lors d’une conférence de presse relatée par le site de news locales Argus Leader (branche d’USA Today) n’avoir jamais rencontré de personne transsexuelle au cours de sa vie – et « ne pas compter le faire, dans un souci d’objectivité« . Mercredi 17 février, après plusieurs rebondissements, il a finalement accepté d’échanger avec des étudiants transgenre. Il s’entretiendra également avec le groupe de sénateurs qui ont voté pour cette mesure.
Les sénateurs en question sont guidés par un républicain, Brock Greenfield. Ils justifient ce projet de loi par leur volonté de « protéger l’intimité des enfants« . Ce discours prend racine dans l’idée – ô combien fausse, mais répandue – qu’empêcher des hommes (qui se considèrent femmes) d’entrer dans les toilettes des femmes revient à protéger ces dernières de potentielles agressions ou de voyeurisme. La presse anglophone a baptisé cette légende urbaine « the bathroom myth » – la mythologie des toilettes, en version française. L’approbation de projet de loi en Dakota du Sud intervient une semaine après le rejet d’une même proposition faite dans l’État de Virginie. Cela dit, même si le texte est ratifié par le gouverneur Daugaard, il sera néanmoins susceptible de se heurter à l’échelon fédéral.
La mesure peut être jugée incompatible avec l’amendement « Title IX« , qui interdit les discriminations sexuelles dans les écoles publiques.
En attendant le verdict du gouverneur, les opposants au texte se mobilisent. Les Démocrates redoutent une diminution du tourisme dans l’État, sur le modèle de l’Indiana qui déplore un manque à gagner avoisinant les 60 millions de dollars depuis le boycott de cette destination après l’approbation d’une loi jugée anti LGBT, souligne le Times.
Au-delà de l’impact économique, Bernie Hunhoff, membre du Sénat, déclare :« Ce sont des enfants très à risque dans leurs écoles … C’est déjà un lourd fardeau, n’en rajoutons pas ». Même son de cloche du côté des militants LGBT : « Les jeunes LGBT sont quatre fois plus à même de commettre des tentatives de suicide que leurs pairs hétérosexuels. 41% des transgenres ou de ceux qui ne se reconnaissent pas dans leur sexe « biologique » ont fait des tentatives de suicide. 41%, par rapport à 4,6%, la moyenne nationale » affirmait déjà en janvier dernier Thomas Christiansen, un activiste local, dans un communiqué intitulé « L’égalité EST une valeur du Dakota du Sud ».